Un minois blond et malicieux à Tonnerre

Des pas poussiéreux avaient, deux jours auparavant, martelé la route dans le jour naissant suivant un bon rythme : deux silhouettes s'étaient détachées dans la brume matinale : un homme et une femme.

Lui, dans la force de l’âge, mûr, sûr de lui, avait donné le rythme de leur marche et semblait connaître la route comme sa poche, par contre sa langue elle, n’était pas dans sa poche : il ne cessait de bavasser et de parler. Elle, petite, à la chevelure aux boucles blondes non maîtrisées, encore jeune, s’émerveillait de ce qui l’entourait, buvant les paroles de l’homme avec une grande attention, s’efforçant de noter le moindre détail dans son esprit. Enfin ils étaient arrivés chez lui. Dans cette ville donc elle avait tant entendu parler, enfin surtout grâce à la soule et aux nombreux exploits qu’il lui avait contés depuis leur rencontre plus d’un mois auparavant. Tonnerre et son verger. Tonnerre et ses foudres. Tonnerre et Kaeronn.

Sidie, la jeune thiernoise, était bien lasse de ces lieues parcourues depuis chez elle. Ses pieds la faisaient souffrir des longues marches faites et elle louait Kaeronn chaque jour de lui avoir conseillé de délaisser ses poulaines au profit de bottes bien plus adaptées aux longues distances. Pourtant, elle ne se plaignait pas, pas un seul instant, pas une seule fois. Elle avait conscience que malgré ses dires, son compagnon de voyage avait dû ralentir le rythme de marche qu’était le sien, celui d’un homme habitué à arpenter les chemins depuis des années. Donc, non. Sidie ne se plaignait pas. Elle souriait même, et ce malgré les galéjades et les taquineries qu’il pouvait bien lui faire régulièrement. Elle avait compris peu de temps auparavant que le bonheur était un état d’esprit et elle comptait bien garder cet état d’esprit-ci pour être heureuse et profiter pleinement de son voyage.

Ils avaient défait leurs baluchons dans la cabane de Kaeronn. Elle avait rapidement pris ses marques avec son aide attentionnée et la jeune thiernoise blonde ne s'en épanouissait que davantage : elle était plus heureuse que jamais.

Laissant Kaeronn aller discuter tactique de soule avec ses coéquipiers, non pas que cela ne l'intéressait pas mais Kaeronn avait tout intérêt à ne pas tout lui dévoiler s'il ne voulait pas qu'un jour les Couteaux aiguisés de Thiers ne leur fasse mordre la poussière, Sidie avait pris le temps de faire le tour de la ville pour aller à la rencontre de ses amis et découvrir le verger. A qui elle croisait, surtout en taverne, elle disait :

- Bonjour ! Je me nomme Sidonie Fiala, mais tout le monde m'appelle Sidie. Je viens de Thiers dans le Bourbonnais.

Tonnerre avait plusieurs allures. La ville qui fut autrefois grandiose et réputée pour son savoir vivre et son dynamisme. Cette même ville que la demoiselle avait connu renaissante, renaissante dans l'âme suite à une grosse épidémie qui l'avait ravagée. Tonnerre qui avait sombré sous son nez, qui périssait lentement mais doucement.
Ambitieuse et battante, la jeune fille se refusait de laisser la ville tomber dans un gouffre indéfinissable.
Ainsi on trouvait Tonnerre, ville accueillante et plaisante mais par moment, une ville déserte .. inerte.

Le temps s'écoulait, les gens s'effaçait avec lui. Clafoutty, mine sans expression faisait la garde. Rectifions, piaillait avec les gardes, une chopine en main, de quoi tacquiner les veilleurs et donner l'envie.
Une nature tacquine, une fille de gaieté, sourire souvent aux lèvres qui en cachait tant ...

Citation :: Bonjour !.

Regardant la fille, enfin la jeune fille, Claf dans un premier temps ne releva pas la peine de lui répondre, elle la dévisageait.
Blonde, elle était façon boucle d'or donc ! Malgré son sourire, son enthousiasme qu'elle dégageait, Sidie semblait plus qu'épuisée. Innocente ? Ou dangereuse ? Venait-elle pour quelque chose ? Il lui semblait que oui ...

- Et les zouzous vous pouvez effectuer votre travail non ! Présentation, âge, caractères et le tralalala ...

- Mais, demoiselle Claf ... s'est déjà présentée ... deux hommes gaillards, costauds même qui en temps normal devraient effrayer la Claf, les voilà balbutiant, une honte.

- Hein quoi ? Non non je vous assure que non !!!
En effet Claf en pleine réflexion de dévisagement de visage, avait oublié le plus important, qui d'ailleurs raisonnait dans sa tête

Citation :: Je me nomme Sidonie Fiala, mais tout le monde m'appelle Sidie. Je viens de Thiers dans le Bourbonnais

La thiernoise était perplexe, oui perplexe.

Vraiment certains bourguignons étaient bizarres. Ce n'était pas la première fois qu'on se contentait de la dévisager sans prendre la peine de lui répondre et de se présenter à elle en retour. Mais cette fois c'était pire : elle avait carrément l'impression qu'on se fichait d'elle ouvertement.

Le numéro entre les deux gaillards dépassant la donzelle qui les tançait d'au moins deux bonnes têtes était des plus surprenant, voir improbable. Sidie porta sa main devant sa bouche et toussota pour attirer de nouveau l'attention sur elle et mettre fin à cette mascarade ridicule. Elle reporta ses yeux sur la femme qui semblait mener la danse :

- Hum... navrée de vous importuner, je vais passer mon chemin et aller boire seule. J'aurais simplement espéré qu'en tant que joueuse de soule vous auriez accepté que je vous offre un verre...

Nouvelle tentative d'approche amicale : le terrain de la soule et les points faibles de tous les joueurs de soule : l'alcool. Sidie n'était pas idiote et avait parfaitement reconnu l'une des coéquipières de Kaeronn qu'elle avait aperçue sur le terrain lors du match de la demi finale contre les Bitterrois. Elle esquissa un nouveau sourire et amorça un mouvement pour s'isoler à une table un peu plus loin

Pourquoi être assez froide ? Ce n'était point l'habitude de Claf, non point du tout, j'peux vous le jurer ça! Pourquoi cette fois-ci ?
Enfin j'ai oublié un petit passage.
Claf était curieuse et aimait scruter tout, je dis bien tout.
Mauvaise accueil, dont le remord la rongeait, tentant de se rattrapper, elle l'interpella de nouveau

- Hey demoiselle !!!! Quoi hein demoiselle ou m'dame ? Peu importe
Approchez, approchez, je ne vais faire tout un tralalala, faut dire que ces derniers temps on est encore plus attentive à qui entre ... Pardonnez donc, si j'écoute les dires de ces deux gaillards, vous vous êtes présentée ?
Pardonnez ma mauvaise ouïe, non non pas sa mauvaise ouïe c'est plutôt son manque d'attention flagrattante, elle n'écoutait point!

Je suis Clafoutty dict Claf d'ici même, joueuse de soule, petit sourire, en effet son visage lui était familier, elle l'avait vu dans les gradins durant le match de demi final.

Bienvenue, plutôt permettez que j'vous offre à boire, j'y tiens ... et vous me raconterez votre route ... mais puis-je vous redemandez votre nom? Faut dire que je n'étais pas très à l'écoute.

Petit sourire, elle se faisait souvent avoir par l'acool mais pas sur le premier abord, en effet Claf a pour habitude d'offrir en premier une bibine aux étrangers.

- Hey demoiselle !!!!

Les boucles blondes volèrent un instant, le temps que la tête de la jeune femme ne se retourne vers la Tonnerroise pour poser ses prunelles sur celle qui l'interpelait.

- Approchez, approchez, je ne vais faire tout un tralalala, faut dire que ces derniers temps on est encore plus attentive à qui entre ... Pardonnez donc, si j'écoute les dires de ces deux gaillards, vous vous êtes présentée ? Pardonnez ma mauvaise ouïe. Bienvenue, plutôt permettez que j'vous offre à boire, j'y tiens ... et vous me raconterez votre route ... mais puis-je vous redemandez votre nom? Faut dire que je n'étais pas très à l'écoute.

Instantanément, un sourire se dessina sur le minois thiernois. Elle refit un pas, puis deux en direction de la tablée et inclina poliment la tête, toujours souriante. Elle riva ses yeux sur le visage de Claf, et tira une chaise à elle pour prendre place en lui déclarant :

- En tant que joueuse moi même, parmi les Couteaux aiguisés, j'accepte ce verre, Dame Claf.

Elle croisa ses jambes, bottes contre botte et avança ses mains sur la table, sans quitter la donzelle des yeux.

- Sidie. Je suis Sidie. Je suis Auvergnate et je viens de Thiers. J'ai fait le voyage jusqu'ici sans encombre, avec Kaeronn, mon compagnon.

Pourquoi avait-elle cru bon d'ajouter cette dernière précision ? Sans doute parce qu'elle en était fière et qu'elle savait que la numéro trois des Foudres le connaissait bien et que peut être il lui avait parlé d'elle ? Elle accueillit avec un large sourire les chopes de bières servies par le tavernier et s'empara d'une pour la lever et lancer joyeusement :

- Au Foudres ! Et à Tonnerre !

Un sourire, Claf la regarda prendre place, elle aussi semblait la dévisageait, ce regard lourd posé sur elle, l'amusait plus que tout.

- Siouplait, deux chopines !!!! Non quatre, vous m'connaissez, jamais une sans deux !!!

Petit rire en pronançant ces derniers mots. Mots qui lui rappelaient un soir en taverne, où le tavernier, l'un de ces amis proches, lui aussi joueur la virait et répétait " jamais un sans deux ... jamais quatre sans cinq..." Sotte elle ne voyait rien venir...
Bref...

- Enchantée Sidie.. demoiselle ou dame ? Mieux vaut se renseigner que causer tord et travers dans un mot mal placé .

- En effet je suis joueuse, et j'ne vais pas dire que je mets en péril mon beau visage ... sourire amusée, elle s'empara des siennes ..

- Santé ! A votre séjour ici, et si j'en crois l'information, à notre victoire sur vous

Pourquoi avait-elle cru bon d'ajouter "compagnon" ? Que signifiait ce mot compagnon? Compagnon de route, ou encore plus intimement ? Non Kae ne lui en avait point parlé, sauf après qu'elle se soit faite du sang froid sur l'étrangère "espionne".

Le petit sourire sur le coté de Sidie s'étira en entendant qu'elle ne profiterait non pas d'une, mais d'au moins deux chopines. Joueuse de soule elle était et par conséquent consommatrice de bibine également. Enfin quand Kaeronn ne lui sifflait pas ses verres en douce et lui en laissait un peu.

- Enchantée Sidie.. demoiselle ou dame ?

La main de la jeune blonde balaya l'air comme pour chasser la question et indiquer que cela était sans importance. Elle précisa avec un léger sourire :

- Demoiselle. Mais Sidie est bien suffisant, oubliez donc les particules, elles ne sont pas pour moi.

- Santé ! A votre séjour ici, et si j'en crois l'information, à notre victoire sur vous

Son verre encore plein fut secoué par plusieurs vagues causées par le rire de Sidie qui la secoua toute entière. Elle s'esclaffa bruyamment :

- Ha ha ha ! Les Tonnerrois sont-ils toujours aussi sûrs d'eux au risque de finir un jour par se ridiculiser ? Vous ne dérogez pas à l'idée que Kaeronn a su me faire de votre ville Claf !

Le jeune blonde porta sa bière à ses lèvres pour en boire quelques bonnes lampées, les yeux rieurs et légèrement moqueurs, avant de poursuivre :

- Notre équipe des Couteaux aiguisés est toute jeunette encore mais les jeunes sont là pour apprendre et dépasser les vieux, même si ces vieux vont en finale de la coupe royale. Car voyez vous, si les Tonnerrois sont sûrs d'eux, les thiernois eux, on une ambition débordante : celle de battre votre équipe. Mon meilleur ami Sglurp, qui devrait arriver dans les jours prochains, se hâtera de vous confirmer cet état de fait.

Nouvelle franche gorgée en guise de pause alors que ses prunelles malicieuses se posaient sur le visage de son interlocutrice qui semblait méditer sur une précision qu'elle avait faite un peu plus tôt. Kaeronn n'avait donc pas parlé d'elle à cette femme. Il lui semblait pourtant que le grand et costaud Casanier, la connaissait, mais sans doute était-ce une idée. Elle leva son second verre, le premier étant désormais vide et rajouta :

- A Tonnerre ! Car s'il est une chose que je dois bien rendre à Tonnerre c'est que c'est une charmante ville, avec de lieux forts agréables comme votre verger, la clairière que Kaeronn m'a faite découvrir, située là haut un peu plus loin en amont de la rivière, et ses habitants charmants. Et un tout* particulièrement, bien qu'il ne soit pas souvent chez lui, comme c'est actuellement le cas.

Boucle d'or, semblait très motivée, voir presque sûre de battre Les Foudres, équipe foudroyante, une équipe du tonnerre, d'où les massacres flagrants, et victoires sur les autres équipes.
Les Tonnerrois étaient un peu trop sûrs, mais il est mieux d'être sûr de soi que de douter, le doute n'apporte aucun but précis... foncer ... foncer voilà ce qu'ils en pensaient. Les remords venaient d'eux même par la suite.

Amusée par Sidie, Claf riait et but d'une traite sa première chopine. Non, il n'y avait ni Parv ni Edwen pour lui piquer sa bière. Chose que je précise, elle ne se gênait pas pour le faire, du moins avec les familiers. Elle avait cette manie de siffler les verres de ces amis.

- Que je sache, le ridicule ne tue point le Tonnerrois, le ridicule permet au Tonnerrois de s'abaisser une fois, je dis bien une seule fois, avant de se relever encore plus sûr qu'avant! Ainsi ouii on est plus que fière, et une manie du bidonnage.

Sourire amusée, c'était là une sacrée rencontre, Claf se tenant bien, plutôt s'efforcant un tantinet. D'un côté sa bonne habitude de sympathiser, de l'autre sa méfiance. Méfiance innocente, accueil qui se poursuit dans un paisible discours entre les deux demoiselles.

- Je peux admettre, qu'on dit souvent que l'élève dépassera un beau jour le maître. Mais à mon avis vous n'êtes point prêt pour accomplir et réaliser cette belle citation.

Petit raclement de gorge, elle bu plus de la moitié de son verre. Bougre qu'elle ne savait pas se tenir, enfin à Tonnerre on sirotait rarement la bière, on la buvait, mais vraiment! Elle poursuivit plus amusée qu'irritée.

- Et puis, permettez petite rectification, "vielle" équipe ? Vous y allez un peu fort je trouve, se moquant, jeune jeune sont la plus part enfin, je fais partie de ces jeunes, exepté mon Kaeronn.

- Santé à vos rêves, en effet les rêves sont permis, mais très vite déçevant! Sourire satisfait, elle trinqua avec le peu de bière qui lui restait, et la termina.

- Hum hum, deux autres chopes que ça saute hein !!! Rire, elle ne manquait pas une seconde d'embeter le gaillard de tavernier... non pas une seule ! D'une manière amicale bien entendu.

Petits hochements de tête, grand sourire étiré sur le côté en une légère expression mêlant moquerie et malice, Sidie écoutait Claf lui répondre, amusée. Elle reposa son premier verre vide, sa descente valant grandement celle de Clafoutty, elle buvait cependant de façon un peu plus continue et délicate que la tonnerroise. Cela lui avait en effet valu le surnom de "grosse cuve" ou de "sac à vin", gentiment donné par respectivement son professeur d'écrire et un inconnu rencontré à Cosne quelques jours plus tôt.

- je fais partie de ces jeunes, excepté mon Kaeronn.

MON Kaeronn ? Sidie releva son sourcil gauche. Elle le relevait* toujours lorsque quelque chose l'intriguait vraiment. Et entendre cette femme, user d'un possessif pour parler de celui avec qui la jeune thiernoise partageait sa vie, l'intrigua au plus haut point. Elle tâcha de ne pas trop montrer qu'elle était titillée par ce petit mot et vida la chope qu'elle tenait dans sa main en une traite : à grandes gorgées, le temps de reprendre un peu de contenance.

Etre décontenancée, elle n'aimait pas ça. Sauf quand* c'était du fait de Kaeronn qui se moquait d'elle. Elle reposa lentement son verre vide alors que Claf passait commande pour deux autres pleins. Sidie rajouta en déposant quelques écus sur la table :

- Apportez nous un tonnelet se sera plus simple tavernier !

Alors qu'elle empoignait la chope offerte par son interlocutrice en attendant que le tavernier apporte le fût, elle lui demanda avec un petit sourire intéressé :

- Vous semblez bien connaître mon compagnon. Seriez vous de ses amies ? C'est curieux qu'il ne m'ait jamais parlé de vous. Je veux dire, même lorsque nous parlions de soule, je n'ai pas souvenir qu'il ait mentionné votre nom. Les seuls dont je me souvienne sont ceux de votre bourgmestre et de votre capitaine.

Et bien, la différence entre un Bourguignon et un autre, était l'alcool. Réputation qui peut soit ternir soit faire l'épopée du Duché que Claf chérissait. Oui des boits-sans-soifs, enfin petit sobriquet que quelques tonnerrois avaient trouvé, qui vallait mieux qu'ivrogne, moins négatif.

Décidément, les joueurs de soule faisaient tous partis de la catégorie de soulard, petit rire, pensant à l'équipe de bézier.

A "mon" Kae, Sidiie semblait plus qu'intriguée, interloquée même pour ne pas dire presqu'affolée. Réagir de la sorte, Claf trouvait plus que ridicule.
Rire, poursuivant sans daigner reprendre ou apporter une explicatioon possible ( en effet, Claf aimait bien rajouter le "mon" à des amis qui lui tenaient à coeur ), elle répondit toujours dans ce ton " On déstresse, et on y GO y a pas l'feu ".

- Oui bonne idée, j'sents qu'on finira assez euhm sobre comme on dit ici ... Regardant les yeux plus gros que le ventre le tonnelet.

Ecoutant attentivement Sidie, elle fronca le nez, petite manie à elle de se moquer, et reprit calmement.

- Oh, il ne m'a jamais parlée de vous, navrée ... que je sache il ne vous a pas non plus parlé de moi. Une coéquipière, pour l'histoire d'ami, je ne peux savoir ce qu'il en pense.

Pourquoi ne pas profitez la rassurer? Non elle appréciait cette situation, que boucle d'or lui demande franchement, elle répondra, mais non aux sous-entendus.

- Et vous compagnonne de mon.. oups de Kae depuis longtemps ?
Sans gêne, elle la regarda, sirotant CETTE FOIS le contenu de sa chope.

- Oh, il ne m'a jamais parlée de vous, navrée ... que je sache il ne vous a pas non plus parlé de moi. Une coéquipière, pour l'histoire d'ami, je ne peux savoir ce qu'il en pense.

- Humph !

C'était sorti tout seul. Comme à chaque fois que quelque chose lui clouait le bec, la contrariait ou l'agaçait, Sidie humphait. Se reprendre et ne pas montrer sa contrariété, vite. Elle s'enquilla son verre en main d'une traite et se détendit en réalisant que finalement c'était bien normal : comment Kaeronn aurait-il pu parler d'elle à cette fille puisqu'il était avec elle durant toutes ces semaines. Elle reposa son verre vide lentement et regarda Claf.

- Et vous compagnonne de mon.. oups de Kae depuis longtemps ?

Enfin LA question ! La thiernoise esquissa un petit sourire narquois. Elle s'était faite attendre ! Sourire toujours au coin des lèvres, elle se tourna avec son verre vers le tonnelet que l'on venait de leur apporter et actionna sa bonde pour remplir lentement son verre, puis celui de Claf, en prenant bien son temps et en laissant la question en suspens. Quand leurs deux verres furent de nouveau pleins du liquide ambré et pétillant, elle se retourna vers la jeune femme, un large sourire aux lèvres.

- Depuis qu'il m'a enlevée oui. Suffisamment pour désormais partager sa route, ses journées, sa vie et savoir que je lui suis profondément attachée.

Elle porta à ses lèvres son verre plein de mousse pour prendre une nouvelle lampée.

- C'est sans doute pour cela qu'il me tenait tant à coeur de découvrir Tonnerre, sa ville, son chez lui. Et ses amis.

Dans le premier temps, la blondinette semblait fort mais fort fort agacée, soit plusieurs états d'âme simultanément.. Contrariée, agacé et encore peut être bien surprise. Oui surprise.
Manquant de pouffer de la situation qui lui paressait si embarrassante mais à son goût et son aise, elle trinqua de nouveau lorsqu'on lui tendit un n-ième verre.

- Et bien je trouve que vous faites bien, s'intéresser de prêt à son "compagnon" ( je précise qu'elles parlent et donc ne peuvent remarquer les guillemets à compagnon ).
Mais encore apprendre à connaître voir aimer sa ville.

Petit gloussement à Enlevée ..., elle reprit une gorgée, délectant le liqueur qui lui tenait tant à coeur:

- Et biien, enlevée? Waouh faut le voir autrement, plutôt ...
Claf allait droit au but, sur le premier abord elle n'avait voulu creuser cette histoire de compagnon, car le demander dès le premier échange faisait fort peu polie.
Jamais "ashamed", la jeune dame avait posé à son interlocutrice ce qui l'interloquait, réponse faite, Claf était satisfaite.

Sourire goguenard, la boucle d'or semblait fort interloquée sans pour autant tenter de résoudre ses doutes.

Sidie se détendait. Cette femme n'était pas si froid et distante que cela finalement, ou peut être bien étaient-ce les bières qui commençaient à faire effet doucement et que l'alcool faisait lui aussi son office. Néanmoins, Sidie se sentait particulièrement bien et tout dans son attitude le prouvait. Elle s'adossa à sa chaise et croisa les jambes, botte contre botte, son verre à demi plein toujours en main, et avec un large et franc sourire aux lèvres.

- Et biien, enlevée? Waouh faut le voir autrement, plutôt ...

La jeune blonde lâcha un petit rire amusé et rétorqua :

- Si vous êtes des amis de Kaeronn, vous savez parfaitement tout comme moi que lorsqu'il arrive dans une vie, celle ci n'est plus jamais la même. Le terme enlevé n'était donc pas choisi au hasard.

Yeux pétillants, un léger sourire malicieux se dessina sur les lèvres de Sidie qui touchèrent l'instant d'après le bord de son godet pour le vider de son contenu. Elle poursuivit donnant une nouvelle orientation à la conversation :

- Kaeronn m'a maintes et maintes fois parlé d'une coutume de votre ville : la bataille de fruits pourris. Or, je n'ai pas encore eu la chance d'y assister. Y a t-il une période de l'année particulière ? Une occasion particulière pour cet us un peu... particulier ?

La bière faisait manoeuvre, la tention du premier contact n'était plus ou que peu.
Claf n'était plus distante, et reprenait ses manières chaleureuses.
La boucle d'or, charmante faut l'avouer se mettait à son aise, ce qui eut pour effet de ravir Claf qui se savait chez elel, n'était nullement gênée.

- En effet, cela est merveilleux, Kae l'est ....

Laissons là le pauvre Kaeronn, dont les oreilles devaient fortement siffler.

- OH une période ? Aucune hélas je n'ai pas eu le plaisir non plus d'y participer, Sinon après avoir finit une chope .... s'empara d'un n-ième verre, le vida et le balança en arrière on fait ça ...

- Faudrait penser à reproposer cette activité de bataille de fruits pourris. Tant que j'y suis, attendez moi là.

Sourire amusée, elle préparait un sacré coup, la bienvenue coutume qu'elle avait lançé, avec hâte, exitée elle remplie un seau d'eau et le déversa sur Sidie.

- LA BIENVENUE A TONNERRE CHARMANTE VILLE !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

Qu'est ce que c'était que cette coutume qui n'était pas connue par les habitants de la ville ? Sidie rehaussa son sourcil gauche et pinça un peu les lèvres pour ne pas se montrer désobligeante avec son interlocutrice parce que de sa mirette, soit Kaeronn lui avait raconté des âneries, soit la Claf était à coté de la plaque. Sidie était peu être peu objective, mais elle avait beaucoup plus confiance en Kaeronn qu’en cette fille qu’elle venait à peine de rencontrer et qui s’était déjà montrée un peu distraite. D’ailleurs, la jeune thiernoise se demanda si elle avait bien la lumière à tous les étages quand elle jeta sa chope vide derrière son épaule : comment allait-elle boire les suivantes si elle n’avait plus de contenant ?

- Tant que j'y suis, attendez moi là.

La petite blonde regarda la brune se lever avec un petit sourire amusé aux lèvres. Elle supposa que la bière, à peine bue devait déjà faire son office et avait rempli ce qui devait inéluctablement se vider un jour. Elle sirota son verre lentement, laissant glisser ses yeux sur l'intérieur de la taverne, sur les visages des clients présents. Son attention fut interpellée par une bouteille rangée sur l'étagère derrière le comptoir : du Nuits Saint Georges. Sans doute de la même production que celle que le Baron de Lormes, Casanier lui avait fait goûter la veille au soir. Elle se souvint de ce délicieux parfum accroché à ses papilles et ravissant son palais. Toute perdue à ce petit souvenir épicurien, elle n'entendit pas la tonnerroise arriver derrière elle.

Jeter un seau d'eau par surprise sur la tête de Sidie était sans doute la pire des choses que l'on pouvait lui faire subir, à elle, qui à peine deux mois plus tôt avait manqué de se noyer et qui sans l'intervention du curé de sa paroisse, serait passée de vie à trépas pour aller pourrir sur la Lune. Lorsque l'eau chuta de son contenant sur la tête de la jeune blonde, instantanément, elle se crispa, à en faire tomber son verre encore à demi plein. Un râle profond, réflexe réminiscent de cette nuit traumatisante, s'échappa de sa gorge alors qu'elle luttait contre la révolte de tout son corps comme pour reprendre son air. Les secondes semblèrent s'étirer sur des lustres et la jeune Sidie était en proie à une lutte intérieure profonde : celle entre prendre ses jambes à son cou et tordre le cou de celle qui venait de beugler à son oreille :

- LA BIENVENUE A TONNERRE CHARMANTE VILLE !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

Encore dégoulinante de la tête aux pieds, Sidie passa nerveusement plusieurs fois ses mains sur son visage pour le débarrasser de cette eau qui lui coulait dans les yeux. Avec ce geste, elle tenta de retrouver consistance, contenance et de ne pas laisser s'exprimer sa colère montante. Pourtant, ce fut un regard glacial et furieux qu'elle adressa à Clafoutty. Les poings crispés, elle se contenait péniblement pour ne pas en décocher une à la tonnerroise pour cette blague qu'elle trouvait du plus mauvais goût. Le regard assassin, elle lâcha entre ses dents serrées :

- Ne faites plus jamais ça... jamais.

La Tonnerroise avait beau être fière de sa ville, de son Duché ce n'était pas pour autant qu'elle en était érudit.
Il fut plusieurs temps à Tonnerre : l'un dont Kae ne devait point connaitre, un deuxième qui ravissait l'homme et un parmi tant d'autre qui appartenait au monde de Claf. Hélas cette bataille n'avait plus fait entendre parler d'elle, restée dans l'ignorance et dans l'ombre, la coutume devait être enterrée.
Pour lui en vouloir de son ignorance, on devait être stupide. Douter d'elle et la faire passer pour manipulatrice ou menteuse, faisait parti d'une plus grande exagération possible!

Regardant Sidie, le visage entre mille doute, Claf ne put s'empêcher de rire. La scène comique qu'on lui offrait était à coup sûr exellente!
Secondo voir cette blonde naïve, et grimacer devant son superbe et grandiose lancé de chope, l'amusait éperdument.
Non pas que Claf était stupide, loin de là, mais par moment immature, enfin sur certain point.
Cette coutume de lancé de chope se faisait auparavant à Tonnerre, maintenant moins. La n°3 des Foudres haissait cette manie, étant elle même tenancière et devant ramasser par la suite les chopes.
Toutefois, étant en "congé" de ce boulot, et voulant donner un avant goût des manières tonnerroises, elle se permit d'en faire autant.

De ce qui est de boire, elle en prendrait un autre gobelet.

Décidément, les bourdes s'enchaînaient, l'humeure amicale qui commençait à s'installer entre les deux femmes venait de se dissiper. La "sottise" ou sous le nom de coutume de bienvenue que Claf venait de faire, passait comme une erreur fatale.... un crime, un meurtre pire encore un assassinat !
Sans blague faire toute une histoire, un mélodrame pour un seau d'eau, en période de chaleur, et après plusieurs bières ... n'importe quoi où allait le monde? Dans le gouffre.
Dire que pour Claf ou les Tonnerrois, un seau d'eau n'était rien comparé à ce qu'on pouvait faire d'autre ...

Dès le contact avec cette eau, Sidie semblait paniquée, chose que Claf n'avait pas compris mais s'était rapidement approchée pour lui venir en aide .

- Pardonnez ..... j'ne pouvais savoir ....

Non, ce n'était pas une agression, ni un soucis de vouloir faire fuir cette visiteuse, mais pour la mettre dans l'ambiance et la faire sentir comme chez elle. Bougre que Claf pensait mal très mal avec ses 3 neuronnes selon Pêchelune.

Citation :: - Ne faites plus jamais ça... jamais.

Sourire intérieure, l'attitude glaciale, voir criminelle de la femme, l'amusait.
Elle aurait aimé dire beaucoup sur l'instant mais s'abstint non par peur mais par respect pour son interlocutrice.
Des menaces qui pour Cla n'avait aucune importance, barbare elle l'était lorsqu'il le fallait. Sidie, ne représentait rien pour elle. Rhadia représentait tout, mais elle n'avait pas hésité à se battre avec.

La dernière phrase de boucle d'or raisonnait dans sa tête, comme un poison, elle la regarda moqueuse, lui balanca un linge pour se sécher, et ramassa le verre qu'elle avait balancé, puis tourna les talons.

Mieux vaut, s'en allait que provoquer un meurtre, aux risques de perdre son ami à qui elle tenait énormément.
Pour une fois que son esprit de sagesse prenait le dessus, et que son côté enfantin se taisait, elle pouvait être fière.

S'adressant aux deux gardes :

- Mettez la note du tonelet sur mon compte, j'verrais plus tard avec vous.

Elle fit de nouveau quelques excuses à Sidie, lui faisant comprendre que ce n'était pas en mal mais juste une coutume, et s'éloigna.

Sidie, tout à sa colère mêlée de panique, perçut le regard et entendit les excuses balbutiées par la tonnerroise. Au fond d'elle même, Sidie savait que si Clafoutty s'était moquée d'elle ouvertement, elle n'aurait pas pu se contenir davantage et que cela aurait pu sans doute mal se terminer entre elles deux.

Elle attrapa le torchon jeté par Claf et commença à s'éponger en maugréant toute seule :

- Wey m'avait pourtant prévenue sur cette coutume idiote... pfff... j'aurais dû voir venir le coup...

Tout en s'épongeant, elle réalisa que sa colère tombait assez vide comparé au mois dernier où elle avait eu besoin de plusieurs heures pour se calmer. Néanmoins, la tonnerroise semblait piquée au vif d'avoir provoqué chez Sidie une telle réaction. Tamponnant ses bras, la thiernoise la regarda ramasser sa chope et se préparer à quitter les lieux. Elle ne retint pas Claf. De toutes façons, elle étant trempée, elle allait devoir rentrer chez Kaeronn pour mettre à sécher ses affaires si elle ne voulait pas attraper la mort et traîner une toux trois semaines comme la fois précédente. Fabuleuse coutume : ou comment mettre fin à une discussion sympathique.

Sidie se contenta d'un léger signe de la tête à l'attention de Clafoutty qui prenait congés en s'excusant de nouveau. Elles se reverraient, la blonde le savait. Sur un terrain de soule ou ailleurs, mais elles se reverraient. Le jalons étaient posés. Sidie espérait au fond d'elle que Claf se souvienne que l'eau et elle ne faisaient pas bon ménage et que ce genre de blague, elle ne rigolait pas avec.

Récupérant sa cape, par bonheur sèche, elle se rhabilla à son tour et s'emmitoufla dedan. Sidie salua le tavernier et quitta les lieux pour aller retrouver Kaeronn, qui à coup sûr, sauterait sur l'occasion pour se moquer d'elle à gorge déployée en la voyant rentrer dans un tel état.

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